Texte : Eric Bonnotte
Article paru dans UFO Aout 2006
Janvier 2006, forum de l’ultrafond : Lionel Planes, dit « Yoyo », propose de faire revivre un monument disparu de la course à pied : la Fort’iche de Maurienne.
Mai 2006, Ultrafondus Magazine N°32 : Guillaume Millet nous présente en page 24 sa vision de l’entraînement à l’ultra-trail et notamment sa manière de préparer l’UTMB[1] à travers la réalisation de « week-ends chocs ».
La décision est vite prise de joindre l’utile à l’agréable : cette Fort’iche Off me servira de base pour réaliser une séquence « choc » dans l’optique de préparer l’UTMB 2006.
Rendez-vous est pris tout début juillet pour ce qui sera, pour moi, un savoureux voyage au… pays du « choc ».
Jour 1 : jeudi 6 juillet 2006 – 12h30 – Haute-Maurienne
Col du Glandon, 44 km (vélo), D+ = 1500 m
Je sors de la voiture les sourcils froncés et le regard porté sur les lourds nuages accrochés aux parois de calcaire de la Maurienne. Le programme d’aujourd’hui est assez simple : j’ai prévu l’ascension de trois cols: Glandon (1924 m), Croix de fer (2067 m) puis col du Mollard (1608 m) soit environ 1700 m de dénivelé positif pour 80 km de vélo.
Je suis un adepte de l’entraînement croisé et ai décidé de débuter ce voyage au pays du « choc » par le cyclisme mais ces énormes nuages qui plombent le ciel ainsi que les trombes d’eau que j’ai pris sur le pare-brise sur l’autoroute ne m’inspirent pas confiance.
J’ai fait « météo » deuxième langue à l’université et me souviens de quelques axiomes tels que « rougeurs du soir, espoir », « nuages du matin, chagrin », « Orages, Ô désespoir » ou encore « Pluie du midi, reste au lit » mais je suis d’un naturel optimiste. J’enfile donc ma plus seyante tenue fluo du cycliste de base et enfourche ma Rossinante d’aluminium pour affronter ces trois cols.
Les premières gouttes mouchettent le goudron au kilomètre 4. J’enfile mon coupe-vent. Cinq cents mètres plus loin, la pluie fine se transforme brutalement en cataracte digne du Niagara. Suis-je passé sous une chute d’eau ? En quelques secondes, je suis trempé jusqu’aux os. Le tonnerre se met à gronder aussi soudainement, accompagné d’un vent violent qui me fait chanceler. Un abri s’offre à moi sur le bord de la route et je m’y précipite, tentant vainement d’échapper au cataclysme qui déferle sur cette sombre vallée. De longues minutes passent. La pluie devient moins brutale, les grondements de tonnerre s’estompent et je décide de repartir.
Au kilomètre 11, St-Colomban-des-Villards m’accueille sous un nouveau déluge. Je suis têtu et de toute façon complètement trempé, frigorifié. Je ferme les yeux, serre les dents et escalade ce Glandon en rentrant les épaules à chaque coup de tonnerre qui se répercute longtemps sur les parois de la vallée. Je devine plus leur présence que ne la perçoit : un brouillard épais m’entoure. Je ne discerne la route qu’à une poignée de mètres devant moi. Soudain une pancarte. Je suis au col. Je ne m’attarde pas. Il fait froid, tout est sombre, gris : je ne vois rien, suis congelé. Je renonce aux deux autres cols et fait demi-tour.
La descente est terrifiante, glaciale : mes doigts sont crispés sur des freins rendus inutiles par la pluie…
Je rejoins ma voiture frigorifié…
C’est drôle, je ne voyais pas mon voyage au pays du « choc » sous cet angle-là !
Jour 2 : vendredi 7 juillet 2006 – 9h30 – Aussois (Haute-Maurienne)
Râteau d’Aussois (3117 m), Grand Roc (3306 m), distance : ?, durée : ?, D+ = 1450 m
J’ai rejoins la veille au soir Didier Petitjean au Fort Marie-Christine, qui sera notre base vie tout au long de ce week-end choc. Nous avons décidé de réaliser deux sommets faciles à plus de 3000 m : le Râteau d’Aussois et la Pointe de l’Echelle (3432 m).
Didier est Petitijean mais également petit joueur : il préfère ne pas partir directement du Fort et le départ se fait donc du parking du Plan d’Amont, dominant Aussois, d’où nous nous engageons pour cette rando-course en direction du Col de la Masse. La météo s’améliore progressivement mais les nuages sont toujours présents. Les sommets environnant jouent à cache-cache avec de longs filaments de brume, ne nous dévoilant leurs faces qu’à de rares occasions. Rapidement, nous atteignons le Col de la Masse puis obliquons en direction du Râteau. L’ascension est facile mais nous allons tout de même remettre sur le bon chemin un randonneur complètement perdu dans le brouillard et sérieusement paniqué dans ces éboulis de rocailles. Plus de peur que de mal : l’homme redescend au col et reprend la bonne direction du refuge de l’Orgère, son point d’arrivée.
Le sommet du Râteau est nu et triste : circulez ! Rien à voir. Les nuages nous entourent et le vent siffle à nos oreilles. On ne s’attarde pas. Retour à « La Masse » puis ascension de la longue crête pour arriver à un petit col où nous attend un névé nécessitant un peu d’équilibre. On escalade un empilement de caillasses sur une centaine de mètres de dénivelé avant d’atteindre le Grand Roc, dernière station avant la Pointe de l’Echelle. Là-haut, le grésil nous accueille (l’isotherme 0°C est à 3000 m ce jour-là) et je connais cette longue arête pour aller jusqu’à l’Echelle : aérienne, glissante et sans doute délicate pour des randonneurs en baskets. De toute façon, le brouillard ne nous lâche pas, il fait très froid, il n’y a aucune vue. Aucun intérêt de prendre un quelconque risque pour accéder à ce sommet.
D’un commun accord – surtout le mien ! -, nous faisons demi-tour et rentrons à Aussois en milieu d’après-midi où le soleil, enfin, fait ses premières apparitions.
Jour 3 : samedi 8 juillet 2006 – 4h30 – Valloire (Haute-Maurienne)
Fort’iche Off, étape 1 : 71 km, 4050 m de D+, 14 h d’effort.
Cinq ultrafondus nous ont retrouvé la veille au Fort Marie-Christine : Valéry Caussarieu, Stéphane Couléaud, Stéphane Halbaud, Lionel Planes, instigateur de ce Off d’anthologie et Patrick Raillère. Stéphane H, traiteur de son état, nous propose de fêter cette rencontre autour d’un buffet de sa propre confection arrosé d’un punch qui restera longtemps dans les mémoires !
A 4h30 du matin, le ciel est parfaitement dégagé et nous devinons les étoiles se détachant de la voûte céleste. Didier et moi sommes les seuls à avoir couru cette fameuse Fortiche à l’époque où elle existait et nous ferons donc office de guides tout au long du parcours.
Pour l’instant, tout est simple : du centre de Valloire, il suffit de suivre à la lumière frontale le sentier longeant la route qui grimpe raide au Galibier puis, au lieu-dit « Plan-Lachat », monter par le sentier en direction du Col des Rochilles. Nous atteignons ce premier col alors que le soleil levant éclaire d’un rouge-orangé les plus hauts sommets environnant. Instants magiques. Tout n’est que silence, juste entrecoupé de quelques halètements des coureurs. Chacun savoure le bonheur d’être là, la chance de vivre ces moments d’exception.
La première descente dans le vallon de l’Aiguille Noire est un régal. Les jambes encore fraîches et le cœur vaillant, Stéphane Couléaud décide de lancer une grosse accélération à cet endroit. Tout le monde s’accroche, se pique au jeu et casse quelques fibres dans des quadriceps qui ne savent pas encore ce qui les attend.
Les heures défilent, les efforts redoublent. Les noms des cols et sommets qui ont fait de cette Fortiche un mythe se déroulent comme un générique de film : Col des marches, Mont Thabor, lac de Bissorte, crêtes des Bataillères, Aiguille du Cheval Blanc… Des noms qui soulèvent en moi d’énormes souvenirs. Je suis submergé d’une émotion particulière en attaquant les 1800 m de dénivelé négatif qui nous mèneront aux Fourneaux, sur la N6.
Mais les organismes souffrent, tant par la raideur et les difficultés de l’itinéraire que par le soleil qui nous écrase de tout son éclat.
Nous sommes lourdement chargés en eau et vivres de course puisque nous transportons notre propre ravitaillement. Mais ici, personne ne se plaint, personne ne geint. Le groupe reste étonnement soudé et lorsque l’un d’entre nous connaît une défaillance, les autres se portent à ses côtés pour le soutenir. C’est une étrange amitié, née de l’effort et de la beauté de l’itinéraire, qui nous guidera jusqu’à l’étape du soir toujours prévue au Fort Marie-Christine.
Nous bouclons cette première partie en à peine moins de 14 h. Une petite manip de voitures pour la journée du lendemain, un gros repas au Fort où l’accueil fût formidable et nous nous endormons tous comme des bébés.
Les organismes sont marqués : Lionel et Stéphane qui ne pensaient pas rencontrer de telles difficultés sur l’itinéraire font le choix de ne pas courir la seconde étape. Mais chacun fait bloc, leur propose une aide, un soutien et à force de persuasion, ils décident de repousser au lendemain leur décision définitive.
Il va sans dire que Didier et moi avons réalisé une description précise de ce qui nous attend ce second jour afin que chacun puisse choisir en son âme et conscience.
Jour 4 : dimanche 9 juillet 2006 – 4h30 – Fort Marie-Christine, Aussois (Haute-Maurienne)
Fort’iche Off, étape 2 : 42 km, 3650 m de D+, 12 h d’effort.
Nous y voici, nous y voilà. Le grand jour est là. Que celui qui n’a jamais entendu parler du Mont Froid (2822 m) lève le doigt et retourne à ses études d’apprenti ultrafondeur : interro écrite demain matin !
Le Mont Froid, c’est LA bête noire de tout coureur de la Fortiche. Le juge de paix, le grand décideur. Le Mont Froid vous laissera passer ou vous repoussera selon votre forme du jour, selon votre volonté.
Nous nous élançons tranquillement sur la longue piste qui nous mène à Bramans, dernier village avant l’envol pour les flancs vertigineux de l’immense masse sombre qui s’élève au loin. 1600 m de dénivelé positif à avaler d’une seule traite. Nous sommes reposés , avons bien dormi : Stéphane et Lionel ont décidé de nous accompagner.
Le silence se fait dans les rangs alors que la petite troupe quitte le chemin du Petit Bonheur pour s’égrener dans la première partie de l’ascension qui se passe en forêt. Nous suivons le chemin des Français, marqué d’un gros balisage rouge et blanc. Je suis en tête de la file indienne, montant calmement, m’assurant que le groupe reste soudé. Le fond de la vallée plonge alors que nous nous élevons progressivement mais j’éprouve soudain une certaine gêne, un sentiment indéfinissable, mais que je ne connais que trop bien.
Il m’apparaît très rapidement que nous ne sommes plus sur le bon chemin. Que s’est-il passé ? Qu’ai-je fait au juste ? J’accélère un peu pour me retrouver seul et jeter dans l’intimité un œil sur la carte. Non, c’est bien clair : nous piquons au sud-ouest alors que nous devrions monter nord-est. 180° d’erreur !
J’attends que la petite troupe se rapproche et annonce la nouvelle : il va falloir redescendre de plusieurs centaines de mètres (de dénivelé, cela va de soi) pour retrouver la bonne piste… stupeur et silence.
J’ai soudain la sensation d’être un steack haché lancé dans la fosse aux lions. Six paires d’yeux sont braquées sur moi, certains ont déjà sorti leur machette, d’autres leur couteau et les derniers s’apprêtent à me jeter par dessus la falaise que nous longeons. Les mines patibulaires qui me font face me laissent comprendre que nous n’avons pas le choix : il reste 1100 m de dénivelé positif à avaler et il est HORS de question de redescendre, ne serait-ce que d’un seul petit mètre !
Chacun se plonge donc sur la carte et donne son avis. Nous optons finalement pour une traversée montante afin de rattraper la piste forestière qui doit se trouver à quelques centaines de mètres de là. On évite quelques barres rocheuses, on escalade des arbres abattus, on glisse dans la forêt touffue pour enfin déboucher dans une vaste prairie. Je repère vite l’endroit sur la carte : une grosse demi-heure de « jardinage » nous aura permis de réparer l’erreur. Je me promets d’être plus vigilant à l’avenir.
Enfin nous atteignons le vrai pied du Mont Froid, l’endroit d’où l’on devine le sommet, avec sa croix perchée sur un empilement de cailloux branlant. Nous sommes accueillis en ce lieu par une horde de Patous tatoués sur le poitrail « Born To Kill »… Glups ! Si on franchit la barrière, les gros chiens qui gardent leurs moutons vont nous dévorer les jarrets. Heureusement, je remarque plus loin une seconde clôture qui nous protégera des mâchoires baveuses des gros toutous. Ouf ! nous voilà sauvés et prêts à affronter, droit dans la pente, les 800 derniers mètres de dénivelé positif. A ce moment, c’est chacun pour soi. Il n’est plus question ici que de prendre son rythme personnel, de serrer les dents et de tenter de rejoindre la petite croix qui nous surplombe.
Au sommet, la souffrance se lit sur les visages. Mais quel plaisir d’être tous là, réunis sur cette pointe avec un panorama sans pareil sur la Haute Maurienne. De ce sommet, nous embrassons presque l’intégralité de l’itinéraire qui nous reste à parcourir. Didier et moi expliquons succinctement ce qui reste à parcourir et nous voyons se décomposer les visages de nos compagnons de route.
Heureusement, face à nous, la Vanoise déroule ses superbes glaciers bleutés alors que côté italien, de gros nuages commencent à pointer le bout de leur nez. Le vent se lève et nous ne traînons pas.
Descente sur le Col de Sollière, longue traversée puis la prochaine difficulté se présente : l’ascension du pierrier menant au Col des Randouillards. Nous sommes au départ sur un semblant de chemin que nous quittons très vite pour traverser le pierrier d’ouest en est, jusqu’à la petite passe qui nous permettra de plonger vers le prochain vallon. Plonger est le terme qui convient sans doute le mieux pour décrire cette descente. J’ai souvenir d’une main courante posée dans un pierrier avec une pente proche de 50°. Comment allons nous descendre là-dedans sans corde ?
La solution s’offre à nous par l’intermédiaire d’un petit sentier très aérien où rôdent quelques chamois. Je comprends alors la raison d’être de la corde le jour de la course : ce sentier est particulièrement délicat et il aurait été inconcevable d’envoyer une centaine de coureurs de nuit sur cette sente : accidents mortels en cascade assurés !
Nous voici maintenant presque à la moitié de notre périple : Petite Turra puis Pas de la Beccia. De ce dernier col, nous voyons, face à nous, l’immense pente du Malamot (2900 m) qui sera le point le plus haut de notre périple à travers la Maurienne.
Mais déjà je devine les questions qui brûlent les lèvres de mes amis : « Peuchère ! c’est par où qu’on monte ? »
Facile : on monte tout droit, une fois de plus. Sur la Fortiche, on ne se pose pas de question : c’est toujours tout droit !
Nous avalons la descente de la Beccia sur Savalin en deux coups de cuillère à pot et attaquons le Malamot avec une certaine appréhension. La pente se redresse au fur et à mesure que nous avançons et nous terminons avec un angle sans doute proche de 45°. Nous sommes bien à quatre pattes en train de brouter l’herbe pour franchir ce raidillon sous le Fort de Patacreuse. Puis dernière montée raide avant la longue traversée d’arête qui nous conduira jusqu’au petit col sous le sommet du Malamot.
Longue descente jusqu’au barrage du Mont-Cenis, dernière montée jusqu’au Fort de Ronce et… descente finale sur le Plan des Fontainettes. Nous bouclons les 42 km de cette seconde journée en presque douze heures d’effort.
Au bord du lac, les visages se détendent, les sourires apparaissent, estompant les marques de fatigue barrant les fronts.
Ils l’ont fait ! la Fortiche Off est bouclée et chacun peut laisser aller sa joie et son plaisir d’être ici.
Sacré balade ! et le premier commentaire qui fuse à notre arrivée est : « quel culot pour un organisateur d’oser envoyer sur un pareil terrain des coureurs à pied, de nuit de surcroît ! ».
La seconde idée qui traversera tous les esprits sera : « finalement, l’UTMB est une promenade de santé face à ce monument que nous venons de parcourir. »
Jour 5 : lundi 10 juillet 2006 – 17h00 – Valoreille (Haut-Doubs)
Journée de décompression – Vélo en mode moulinage, 45 km, 500 m de D+
Retour sur terre. Atterrissage brutal mais heureux dans la réalité. Je suis auprès de mes enfants et de ma femme dont nous souhaitons l’anniversaire. Moment joyeux.
En fin de journée, alors que le soleil est moins écrasant, j’enfourche mon vieux biclou pour me dégourdir les jambes. La route me semble bien plate : où sont passées les hautes montagnes du pays du « choc » ?
Fortiche off : ce qu’ils en disent
Patrick raillère, 45 ans, Lyon
- Signe particulier : polyvalent et performant : <3h>
finisher UTMB en moins de 40 h
Enormément de plaisir pour moi tout au long de ce off. J'ai particulièrement aimé le fait que ce ne soit pas une course et donc que l’on prenne le temps de discuter un peu avec tout le monde. Cà, c'est sympa.
Ce que je retiendrai de ce parcours, c’est avant tout la dernière montée sur le Malamot, " le nez dans le gazon". On l'attendait avec impatience cette fameuse montée. D'après les souvenirs de nos "anciens combattants", il fallait monter avec "les mains". Je me disais " ils commencent à radoter un peu nos orienteurs..."
Et bien on n'a pas été déçu. Une montée courte mais vraiment le nez dans le gazon : une vingtaine de centimètres entre mon nez et le sol. Je retiendrai longtemps l'odeur des ces brins d'herbe. J'en ai fait quelques-unes de côtes raides, mais jamais comme cela. Et pourtant la montée s’est bien passée bien. On prend son rythme, on est avec des potes. Ca y est on est en haut, on l'a fait.
A cet instant, un mot me vient à l'esprit : RESPECT.
RESPECT pour TOUS les finisseurs de la Fortiche, la vraie, parce que s'envoyer ce dénivelé de fou dans le final, avec la nuit pour certains, c'est vraiment fort de chez fort.
Pour résumer, malgré la difficulté de cette sortie, pas de mauvais moments, que du bonheur pendant 2 jours.
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Stéphane Halbaut, 42 ans, Pérols (34)
- UTMB, RMV, 100 Km
- Signe particulier : habite en "camargue" et a fait plus de dénivelé positif en deux jours que depuis le début de l'année
J'ai vraiment adoré les descentes ou j'ai pu tenir Didier et Eric, même si j'étais un peu au taquet, notamment la splendide descente sur le lac de Bissorte, le premier jour. J’ai aussi pu
profité d'une grosse défaillance dans la montée sur les crêtes de Bataillère dans laquelle je me rapprochais de Didier pour finalement me reposer un peu. j'ai ainsi du gérer la longue
descente sur « Les Fourneaux » tranquillement pour reprendre toute la lucidité nécessaire afin
d’éviter les embûches du terrain !
J’ajouterais à cela l'amitié sincère et réciproque qui nous a tous lié au cours de ce week-end dantesque !
Stéphane couléaud, 35 ans, Paris
- 100 km de Millau, MBM
- Signe particulier : N'a jamais fait de trail de plus de 42 km
Tout d’abord, cela me rassure de savoir que vous aussi pouvez avoir un corps sans énergie après un tel week-end : je n'arrête pas de m'endormir depuis hier dès que je m'assois !
Difficile de ne rendre compte que d'un moment en particulier tant cette
sortie a pu générer d'émotions positives : beauté des sites qui
s'enchaînent, un gavage d'endorphines à rendre jaloux un toxico, and last
but not least la sensation d'être en compagnie d'amis de longue date... que
j'ai rencontré sur internet le mois précédent ! Bref un immense plaisir à
produire de l'effort. Et quel effort !
L'instant + : l'ascension du Mont Froid, d'abord à chercher des balises
invisibles dans la pampas sur les 800 premiers mètres de dénivelé positif, et ensuite à tirer tout
droit dans la pente sur les 800 m de D+ suivants, comme si seule la ligne droite en
montagne pouvait encore produire des sensations à des UFO. Et pour finir, au sommet de cette pyramide de pierres, une vue imprenable à 360° sur la Maurienne.
Les instants ++ : quand tout le groupe me pousse à aller toujours plus loin,
ne rien lâcher, que ce soit dans la montée partant de Valloire, ou à l'aube
d'un deuxième jour qui devait tenir toutes ses promesses.
L'instant hallucinogène : Lorsque Patrick se renseigne auprès d’un « local » :
- « la direction pour Valmeinier, s’il vous plaît ?
- Vous êtes à Valmeinier !!!! "
Hou là là… La fatigue !
A très bientôt sur d'autres sorties mythiques et ludiques.
Lionel Planes, 32 ans, Cavaillon
- finisher UTMB en 31 h, GR Ventoux, TGV...etc...
- Signe particulier : troque des crozets contre de la fondue au ravitaillement
Si je devais retenir un paysage, ce ne serait pas facile tellement on en a pris pleins les yeux. Ma préférence va au sommet du dernier col le premier jour, de là où on voit "Cheval Blanc" (mon village!!!). La crête qui repart "à plat" du sommet du Mont froid pendant quelques centaines de mètres vaut aussi le détour.
Si je devais parler de regrets, j'en ai au moins 2, associés au Mont Froid. Le premier, c'est, au sommet, de ne pas m'être retourner pour voir le chemin parcouru et Bramans, tout en bas et presque sous nos pieds. Le vent aidant, on s'est vite mis à l'abri coté "soleil", un poil en contre bas et je regrette aujourd'hui de ne pas avoir cette image en tête. Le deuxième regret, toujours lié au Mont Froid, c'est justement une image que j'ai vu, que j'ai en tête et que j'aurais mettre en boite pour l'avoir, la montrer .... Nous étions depuis 1h30 dans les pentes du Mont Froid quand nous avons débouché à 2000m sur une piste forestière (là où on a discuté avec un couple qui avait bivouaqué). D'un coup, tu as levé le bras et tu nous as dit "On va là haut". J'ai levé les yeux et j'ai vu un géant. Il ne restait que 800 m+ mais on aurait dit qu'il en restait 2000 !!! le versant était dans l'ombre, le soleil serait pour nous à la descente de l'autre coté. J'ai le souvenir du groupe qui s'égrène le long de cette piste qui serpente à plat sur le flanc de ce géant et j'ai en tête cette masse noire, énorme, triangulaire qui nous écrase. On est bien petit mais on va y aller. J'ai tout de suite pensé à l'Hymalaya et à ces images des magazines qui montrent ces sommets imposants et inaccessibles. Si j'étais bon en dessin .......
Si je devais retenir un symbole, ce serait la haie d'honneur des marmottes dans les derniers hectomètres, comme pour dire "bravo, vous l'avez fait". J'en ai vu plus en 500m que sur les 119.5 km qui précédaient.
Pour le reste, les mots "solide" et "expérience" me viennent. J'ai trouvé le groupe d'une grande force, d'une grande expérience. Tout était réuni pour une insolation, une déshydratation, un pétage de cheville, une fringale .... et en fait tout s'est géré de façon très homogènes, chacun gérant au mieux ses coups de mou, ses instants de folie. J'ai le sentiment d'avoir rajouter une pierre aux fondations d'un édifice. C'était du costaud et on l'a géré sans soucis, avec même de la réserve si l'on en croit les dernières descentes.
Le dernier point, le plus important à mes yeux, c'est l'approche du trail telle qu'elle a été faite le deuxième jour (le premier jour était très "classique", des GR, des cols ...un peu version TGV). Le deuxième jour donc, même si on en a beaucoup rigolé, j'ai aimé l'approche complètement intuitive du trail façon FreeRide. Finalement, quoi de plus naturel que , moyennant quelques adaptations au terrain pour éviter là une barre rocheuse, là un lac, de pratiquer notre sport de cette façon. Si le chemin est sous nos pieds, tant mieux, s'il n'y est pas, tant pis. La trace d'un groupe de 4 traileurs dans l'herbe haute dévalant le pas de la Beccia m'a paru complètement évidente, bien plus que le long serpentin pris par Stéphane pour rejoindre le Lac. Certes le terrain de jeu le permettait, certes on était en OFF, mais quel bonheur de se sentir si libre. J'imaginais que c'étais possible de faire ça dans le désert et j'ai découvert que c'était aussi possible dans un autre désert, un grand désert vert pas très loin de chez nous.
La Fortiche rend plus fort, j'en suis maintenant sûr et peut être que les organisateurs liront l'article et qu'ils auront l'envie de .......
Lionel encore « sous le "choc" »
Les autres participants :
Valérien Caussarieu, 34 ans, paris
- UTMB, GR73, Annecimes, Ronde des Nutons
- Signe particulier : s'entraîne sur une bosse de 40 m de dénivelé positif, court depuis 2003 et voit des chamois avec de longues oreilles… Gros potentiel en devenir !
Didier Petitjean, 43 ans, mulhouse
- Plein de courses, de toute sorte.
- Signe particulier : Fan de Free Ride en descente, descend à une vitesse incroyable. A participer et bouclé la Fortiche, la vraie.
Eric Bonotte, 40 ans, Valoreille (25)
- UTMB, GRR, Fortiche, ..pfff...etc...
- Signe particulier : notre guide, notre meneur d'allure et accessoirement un gros consommateur de vaseline.
Fortiche Off : quelques conseils
Voici quelques conseils si comme nous vous souhaitez vous lancer dans ce Off dantesque.
- Le parcours : facile jusqu’à Bramans (km 80), délicat par la suite. Avoir une bonne connaissance de la topographie des lieux est impératif. Emporter avec soi une carte (IGN 3534OT), un altimètre et une boussole ne sera pas un luxe. Les cinq coureurs qui ont découvert ce parcours hyper exigeant ont tous eu la même réaction : sans un « guide » avec eux, ils n’auraient jamais réussi à boucler ce Off. La seconde partie se déroule très souvent hors sentier et demande un sens de l’itinéraire plus proche de celui d’un montagnard que d’un coureur à pied. Enfin, 50 % de la balade se déroule à une altitude supérieurs à 2000 m. Soyez donc préparé à l’altitude. Enfin, je vous déconseille fortement d’envisager ce Off en une seule et unique étape comme l’était la vraie course si vous ne connaissez pas le parcours.
- La ravitaillement : prendre avec soi suffisamment de vivres de course pour les durées d’effort prévues bien évidemment. Le ravitaillement sur le premier tronçon est possible à Valmeinier puis à Modane. Mais là, c’est presque la fin de la première étape. En ce qui concerne l’eau, le premier jour ne pose pas de problème particulier : Valloire, Valmeinier, Refuge de Bissorte, refuge du Mont Thabor, Modane. La seconde partie est plus délicate a gérer de ce point de vue. Chaque coureur est parti avec une réserve de trois litres. Les points de ravitaillement possibles sont : Bramans, source dans la descente du Col de Sollières, source dans la montée sur la Petite Turra, source dans un vallon caché dans la descente du pas de la Beccia.
- Pour plus d’infos : n’hésitez pas à me contacter : coureursolitaires@ultrafondus.com
Petite leçon de descente
En ce premier jour, l’ascension du Col des Marches est difficile pour Didier. Il accuse le coup et a du mal à suivre le rythme. Les coureurs arrivent les uns après les autres au col, se restaurent et décident d’entamer la longue descente jusqu’au lac de Bissorte avant que Didier n’arrive. Je reste en haut du col avec Patrick pour l’attendre.
Lorsqu’il arrive et voit que les autres sont déjà repartis, il est fâché. Ouf ! c’est bon signe. Didier est un peu le Grand Schtroumf Grognon et si il grogne ici, c’est qu’il est encore en forme et à peu près lucide. Tout va donc très bien.
Alors qu’il se restaure, il tempête : « Ha ! les saligauds ! ils ne nous ont même pas attendus. Bon, ben on va les atomiser dans la descente ! »
A peine la phrase achevée, Didier, très bon descendeur, se lève et attaque la piste à grandes enjambées. Tout au loin, presque déjà à mi-pente, on devine les maillots de couleur de la petite troupe. Je m’accroche à Didier, Patrick m’emboîte le pas et nous voici parti pour une descente de folie. Après une centaine de mètres, Didier décide de piquer droit dans la pente, coupant à travers un pierrier très raide et plutôt instable. Je plonge à sa suite, suivi par Patrick. On avale les trous, les bosses, les pierres, les virages… On accélère encore et bientôt nous rattrapons la petite troupe qui nous voit passer comme des avions. On ne s’arrête pas, enchaînons virages, droits dans la pente, jump sur cailloux… et stoppons au refuge de Bissorte où nous attaquons le repas en attendant les autres.
Enfin tout le monde nous rejoint. Grosse rigolade, gros sandwiches pour remonter le moral et nous repartons tous reposés vers les crêtes de Bataillère…
La technique de descente : jambes légèrement fléchies pour faire travailler la partie centrale des quadriceps et non pas la portion située juste au-dessus du genou, pieds et épaules parfaitement alignés dans l’axe da la pente, partie basse des abdominaux (juste au-dessus du pubis) contractée pour maintenir le haut du corps très stable par rapport au bassin, partie haute des abdominaux relâchées pour profiter d’une amplitude de respiration maximale. Le regard porte devant soi à une distance proportionnelle à la vitesse. Plus celle-ci est grande, plus on regarde loin pour anticiper les variations de terrain. Les bras font office de balancier pour conserver un bon équilibre dans la course quelque soit la pente et les obstacles. Le haut du corps reste légèrement penché vers l’avant, mais stable dans l’axe vertical alors que la bas du corps est très mobile, très réactif par rapport aux variations du terrain et aux divers obstacles que l’on n’hésite pas à franchir par petits sauts. La foulée n’est pas de longueur constante mais varie sans cesse pour s’adapter au profil du sentier.
Descendre vite sans se brûler les quadriceps est tout à fait faisable à condition de savoir anticiper le terrain, d’être bien fléchi sur les cuisses pour amortir les chocs et baisser le centre de gravité tout en étant relâché au niveau des épaules et d’utiliser son regard pour analyser en permanence le sol. Il faut également avoir appris à gérer la glissade ou dérapage de la semelle qui intervient très souvent lorsque la pente est très raide ou le sol humide.
Good Luck !
L’hébergement à Aussois : Le Fort Marie-Christine
N’hésitez pas une seule seconde : c’est l’endroit rêvé pour votre base-vie. Accueil chaleureux garanti. On ne peut rêver mieux pour un séjour dans le secteur.
Infos sur : http://www.fort-mariechristine.com/
[1] UTMB : The North face Ultra-Trail du tour du Mont-Blanc pour ceux qui auraient oublié.
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