dimanche, décembre 02, 2007

24h d’Arcueil– 6/7 octobre 2007

Venir mourir dans l’embut
134km – 21° sur 36 participants

Le site du magnifique organisateur : Philippe Emonière
Crédit Photos (quasi toutes) : L'Castor Junior (Cédric Charvin)


Préambule

Lors de la Fortish’Off, nous avons eu une discussion avec Patrick Raillere (Patrak) sur ce qui était pour moi une découverte : les circadiens. Tourner en rond pendant 24, 48h, ou 6 jours d’affilés me semblait une réelle incongruité. Et pourtant lui aimé autant ça que la montagne. Alors pourquoi pas. Je veux savoir ce que ressente ces coureurs et ce qu’ils y trouvent. Je subodore qu’ils y trouvent ce qu’un prêtre habitué aux somptueuses églises romanes peut trouver en allant prier dans une grotte pendant un mois. L’ascétisme de la course à pied, à comparer aux fastes de la montagne (lumières, odeurs, paysages).

En 2006 je m’étais pointé à Saint Doulchard pour mon premier 24h en touriste : pas de préparation spécifique, fatigué de ma première saison en ultra-fond (démarrée en sept 2005 avec les 100km de Millau et terminée en Oct 2006 avec St Doulchard), pas de stratégie dédiée aux 24h. Résultat : des jambes en bois dés la première heure et abandon au bout de 6h avec 55km au compteur et impossible de marcher normalement.

Alors au programme de la saison 2007, il y avait deux objectifs : finir l’UTMB et faire un 24h en mettant toutes les chances de mon côté.

J’avais constaté que la forme de l’UTMB (accumulation de foncier durant l’été) tenait environ un mois avant de se transformer en une énorme fatigue sonnant l’heure d’une période de repos de deux mois. Arcueil est exactement 5 semaines après, ca doit passer.

Ensuite l’entrainement. Suivant l’exemple de Patrak (3° et près de 204km à St Fons en 2007), je décide faire du volume. Après 10 jours de repos complet suivant l’UTMB, je programme un entrainement suicide (ca passe ou ca casse) avec 140/160km par semaine. 1h le matin, 1h30 le soir, et week end avec 2h30/3h. Seule la deuxième semaine ne sera pas respectée pour cause d’enfoncement du cartilage inter costal à mon premier match amical de rugby de la saison.

Enfin la stratégie de course. Ne pas s’arrêter, rester sur la piste coûte que coûte, c’est ce que je retiens de la stratégie gagnante des performers de la discipline. Donc pour ça une assistance qui prépare et fournit ce dont le coureur a besoin (nourriture, vêtements, etc …). Mon père Georges (Géo) accepte la mission, et s’en acquittera également pour Philippe Billard (Phil). Nourriture, faire simple : pain d’épice maison, riz blanc avec sauce japonaise sucrée et crème de marron. Le reste (soupe, pates) sera de toute façon fourni par le ravito de l’organisation.

La course

Avec un départ à 11h du matin, les premières s’enchainent comme des perles, avec un rythme parfait et régulier de 10km/h, naviguant de la 7° à la 8° place. L’assistance de Géo est parfaite, et comme le dit Phil, on lui doit beaucoup de km. A chaque fois que je passe Manu, il me dit qu’on verra bien à la 12° heure. Tient pourquoi 12 ? RunSteph a toujours le bon mot qui va bien, bref tout roule.


79km à la 8°heure, 87 à la 9°heure, 94 à la 10°. Vers 21h le match France/New Zealand commence sur l’écran géant mis en place par l’organisation. J’ai un peu de mal à l’apprécier. Dommage, surement le plus bel exploit des bleus pendant cette coupe du monde. Avec une stratégie de 1 tour marché par heure les 6 premières heures, puis 2 tours les 6 heures suivantes, ca fonctionne. Et pourtant une vieille douleur commence à ressortir : le tendon du releveur qui m’avait fait tant souffrir au off des 15 Lacs en juin dernier. En l’espace d’une heure tout se dégrade. En plus les cuisses deviennent dures. Je décide d’aller me faire masser au passage des 100km. Le 100kil passe en 10h45. Le massage est agréable, mais lorsque je ressors, j’ai très froid, et la remise en route est terrible pour les muscles. Je refais quelques tours et ce tendon qui ne me lâche pas. Je refais 6km, et décide d’aller reposer la machine une heure.


A la 13° heure de course, je me lève et retourne sur la piste. Je suis 13° avec 106km au compteur qui ne bouge plus. Il fait nuit, il fait froid, et j’i toujours très mal. Envie de performance oui, mais pas de me blesser. En juin il m’a fallu plus d’un mois sans rien faire pour retrouver une course normal. Galère.

Je continue à tourner comme je peux avec le soutien de Géo, toujours impeccable. Egalement celui de tous les bénévoles avec qui nous partageons la nuit, le froid, le temps qui passe. Jusqu’à la 15°h, où je passe avec seulement 120km. L’espoir d’atteindre les 180kil sont définitivement anéanties, alors je pense sécurité. Inutile de me torturer et de me blesser. Je vais rejoindre les vestiaires, un matelas, et me réveiller … quand je me réveillerai ! Au petit matin, le vestiaire (en fait les douches du gymnase) est plein d’UFO : Sylvain (GGO), Sandrine, Phil, … que du beau monde.

Il est 8h du matin, 21h de course. Après une nuit de 6h, le jour est levé. J’ai toujours aussi mal en courant. Alors je repars en marchant, doucement, pour dire de terminer ce 24h, avec les survivants de la nuit. RunSteph (Stéphane Marchand) fait partie de ces courageux. Alors je fais des tours en papotant avec qui veut. Nous nous regroupons. On harangue des coureurs arrêtés aux stands pour qu’ils viennent marcher avec nous. 14km de plus 3h.

Epilogue

Finalement l’objectif n’est toujours pas tenu. Je ne suis pas vraiment sur d’apprécier à la juste valeur ces courses de circadien. De plus je n’ai toujours pas reçu cette grâce que doivent y trouver ces magnifiques coureurs de 24h, 6jours et plus.

Et pourtant que la fête a été belle : des bénévoles tous souriants et disponibles pendant 24h, sur la piste tous les coureurs sont des amis et non des concurrents, le match de rugby, et une météo superbe. Que demander de plus ? On s’est bien amusé avant la course en se chambrant sur nos objectifs, pendant avec des stratégies étonnantes (grandes siestes, sprints mémorables de RunSteph et GGO au petit matin). Et Gérard Dehu magnifique V4 avec 108km. Les visites de tous ces UFO qui se sont succédés pour nous encourager : Damien Lebas, Val, Oliv91 et Alice avec la désormais fameuse salade et ses tomates (cf. Le Off du Mt Joly), et j’en oublie.

Un seul bémol : le retour en moto : pas terrible après un 24h, et ce n’est pas Ysolo qui va me contredire, n’est ce pas ?

Tel un ballon de rugby tapé un peu fort par un aillié présomptueux, je suis allez mourir par de petits rebonds dans l’embut des mes ambitions, Alors que faire : surement revenir. Mais en coureur ou en assistance / bénévole ?

Merci Philippe pour ce grand rendez vous circadien.