34h08mn - 163km - 8900D+
289° / 1437 Finishers / 2319 partants
Les Photos
Batons : oui
Chaussures : Lafuma Active Trail Pro
Vêtements : tshirt Queshua, short Salomon, Manchons Queshua, Pantalon RaidLight imperméable, veste Gore Tex Millet, veste polaire sans manches Queshua
Sac : Sacs : CAMP MPack Trail Pro 20l + Porte Gourde sur bretelle + Sac à eau 1,5l (entre 3 et 4kg)
Aliments : Saucisson-Pate d’Amande-Pain d’Epice – noix de cajoux – crème de marron + ravitaillements UTMB (soupe et pates)
Sac base vie Courmayeur : chaussettes, t-shirt long, crème de soleil, crème anti-frottements, lunettes de soleil, bandes élasto pré-découpées, complément de nourriture, montre GPS.
Sac base vie Champex : chaussettes, t-shirt court, crème anti-frottements, bandes élasto pré-découpées, complément de nourriture, chaussures de rechange.
L’UTMB 2007, après mon édition avortée de 2006 avec un abandon à Praz de Fort consécutifs à plusieurs coups de chaleur, est l’objectif trail de l’année. Un entrainement démarré dés janvier avec le Off de Camargue, puis 5 trails (Vulcain, Balcons d’Azur, Ardéchois, Dentelles-Ventoux, et Duc Chartreuse), des sorties Off (GRR, TMB+MB, Mt Joly, Tour Mt Cervin) et des raids multisports (NoctiRaid, Raid Eure27, Jouques).
J-7
Depuis une semaine toute la planète UFO est en effervescence pour ce qui représente tout de même un des évènements majeur de la saison d’ultra-trail. Nous nous sommes parfois entrainés ensemble, ou nous sommes croisés dans des courses. Ca se chambre fort sur les perfs à venir et les potentialités de chacun. Un moyen surement d’exorciser une crainte que chacun quelque soit son niveau a, celle de l’abandon. Aussi un moyen de se persuader que finalement ce n’est pas la mer à boire, et qu’on a tout fait pour y arriver avec une préparation idoine, donc tout va bien …
J-1
La planète UFO se retrouve pour prendre son dossard. Je suis un peu privilégié puisque bénévole le jeudi à la vérification des sacs, je croise quelques camarades (Damien, Sanglier, Phil, …). On discute également autour des stands avec la présence de tout ce qui compte dans la famille mondiale de l’ultra-trail : Scott Jurek, Dawa Sherpa, Vincent Dellebarre, Marco Olmo, Jacquerot … ils sont au moins une vingtaine à pourvoir prétendre à la victoire. Enorme. Ca promet une course détonante en tête.
Cette année j’ai aussi un avantage énôooooore : un Ultra-Staff composé de David Lerman un ami de longue date curieux de voir comment son potos va lentement se dégrader tout le long du parcours, mon père Georges qui ne regrette pas les sorties dans la Vercors et les Gorges de l’Ardèche dans les années 70 avec son fiston, et ma femme Sabine qui en profite pour se remettre à la course à pied sur quelques tronçons choisis.
Jour J
La nuit n’a pas été très facile, on y pense toujours un peu. Programme du matin, faire les sacs des bases vie de Courmayeur et de Champex. 11h30, pates. 14h Sieste de 2h, toujours aussi difficile. 16h : j’appelle Damien pour aller ensemble déposer les sacs et aller à la Pasta Party. Nous y croisons les Forticheurs Patrak (un 206km aux 24h de St Fons), Val (3° aux 100miles des Tourbières), Eric Bonnotte (5° au Grand Duc de Chartreuse et une maison construite), Yoyo (4° au Dentelles Ventoux), Stephane Halbaut. Tous en top forme, à l’exception de Steph par manque d’entrainement. Repas pates à nouveau. 18h, tous au départ pour le briefing de Catherine et Michel Poletti. Je suis bien coincé au fond, au chaud, va falloir assurer le départ pour ne pas me retrouver coincer sur les premiers chemin. Les 30’ de briefing sont toujours un peu long, et nous sommes impatients de partir. Mais cela fait aussi parti du rituel. 18h35, top départ.
Chamonix-La Charme – 20h21 – 1h47 de course - 14km - 936D+ - 225°
Ca commence … en marchant, le temps de sortir de la ville. Ensuite c’est la course contre le temps pour remonter l’enfilade de coureurs le long de l’Arve avant les Houches. Le but étant de ne pas se faire enfermer dans la montée au Col de Voza dans un faux rythme. Arrivée aux Houches mon père me passe mes bâtons (pour éviter d’embrocher mes camarades sur la partie dense du début). Je double Alexandra Rousset – croisée l’avant-veille avec Benoit pour un ultime entrainement sur le chemin du Buet (Aiguilles Rouges) – et je passe le ravitaillement sans y prendre part. Ma stratégie est simple : je mange ce que j’ai dans ma besace et ne ravitaille ma gourde et sac à eau que toutes les 3h environs. On attaque la montée vers La Charme. Yoyo et Eric me dépassent en courant et en parlant sur un raidillon, ca calme ! Je m’accroche à Yoyo 10mn. Plus les années passent plus je trouve cette montée de plus en plus courte ! Arrivée au col on entame la descente vers St Gervais.
La Charme – St Gervais – 20h58 – 2h24 de course - 20km - 942D+ - 210°
1000D- d’un coup à froid. Heureusement je l’avais reconnu avec Olivier Tribondeau lors de son Off du Mt Joly. Mais à l’époque il faisait nuit et dans le brouillard, du coup c’est vachement plus simple aujourd’hui ! Je rattrape Yoyo dans la descente. As usual. A St Gervais j’ai mal au ventre. Je m’aperçois qu’en fait j’ai trop serré la ceinture ventrale de mon sac. Il me faudra plus de 10km et 1h30 pour retrouver un niveau de confort correcte. Bonne ambiance à St Gervais, avec un pont bizarre à monter et descendre pour traverser la rue. Etrange. Voir désagréable. Passons. Mon père, David, et Sabine sont là et m’encouragent. Nous retrouvons le silence et l’obscurité à la sortie de la ville.
St Gervais – Les Contamines – 22h22 – 3h48 – 30km – 1463D+ - 207°
Pas trop aimé cette partie assez roulante. Parait il de jour assez jolie, de nuit ca m’a un peu ennuyé. Peut être aussi parce que ce mal au ventre me gênait autant pour courir que psychologiquement pour l’entame de course. Patrak ma passe comme une fusée. Il aime bien lui quand ca roule. Cette année on arrive aux Contamine par le bas. Il n’y a plus l’ambiance style « arrivée de l’Alpes d’Huez » de l’année dernière. Dommage. Mon Ultra-Staff m’accompagne jusqu’à la sortie. On retrouve un chemin connu.
Les Contamines – La Balme – 23h38 – 5h04 – 38km – 2019D+ - 193°
David et Sabine m’accompagnent jusqu’aux grandes dalles romaines de Notre Dame des Gorges qui marquent le début de la montée vers le premier grand col, celui du Bonhomme. Je me sens bien. Les douleurs au ventre sont oubliées. Il fait toujours très bon. Je décide de garder le short et t-shirt manche longue avec les jambières en cas de coup de froid au col. Après une succession de marches et de relances, une petite soupe au chalet de la Balme. Je croise Yoyo qui me demande ce que ca fait d’être sur la base des 27h … franchement ? Ca fait peur, rires !
La Balme – Les Chapieux – 1h39 – 7h05 – 49km – 2792D+ - 164°
La montée est régulière et se passe très bien. Curieusement et contrairement à l’année dernière, je ne rattrape que très peu de coureurs. Et lorsque je regarde derrière moi, la longue guirlande de lampe est assez dispersée. Pourtant mon classement est similaire. Cette impression persistera tout le parcours. En pleine ascension, sur une poussée de la jambe un peu décalée, aïe, mon mollet gauche craque. Comme au rugby toute cette saison, ce problème m’apparaissait lors des appuis latéraux. Comme une déchirure musculaire. Sans panique je continue en espérant que cette douleur ne persiste pas, en faisant attention de ne courir et marcher qu’en ligne. Ca risque de ne pas être simple aux Bovines, mais bon, ce n’est pas pour tout de suite. Surprise au Col du Bonhomme, il ne fait pas froid, pas de vent. J’aime bien cette partie qui permet de relancer, tout en montant, bref, ludique. J’entame la descente vers les Chapieux, quand un besoin urgent de purger la bête se fait sentir. Un problème similaire avait fini par me conduire à l’abandon l’année dernière, en me déshydratant, finissant avec des coups de chaleur. Heureusement cette année j’ai pris les devants avec du Smecta. J’en prends un sachet dans ma gourde. Le problème ne se reproduira pas. Dans la descente beaucoup de boue. De nombreuses glissades. Je finie par chuter. Rien de grave, mais j’ai de la terre partout. Pas terrible l’hygiène pour manger des cahouettes avec des mains pleines de terre ! Au petit jour je verrais que les autres coureurs sont pour la plupart également tombés au vu de leurs tenues bien immaculées. Un autre détail m’étonne, je sens que l’ongle du 3° orteil du pied droit est tombé, alors que je n’ai pas tapé sur des pierres et qu’il n’était pas blessé. En même temps il ne me gène pas. Je verrais ça à Courmayeur pour mettre un coup d’élasto. Comme sur les deux premiers orteils de chaque pied, soigneusement enrobés d’élasto et de cotons protecteurs. Aux Chapieux je croise Yoyo qui repart. Petite tape dans la main, je ne le reverrais plus …
Les Chapieux – Col de la Seigne – 3h46 – 9h12 – 59km – 3793D+ - 165°
Après m’être lavé les mains, avoir rempli mes réservoirs d’eau (camelback) et de coca (gourde), je repars en marchant pour m’alimenter. Ma stratégie est effectivement de ne pas m’arrêter pour manger. Aux ravitos je remplis, complète les niveaux. Mais je m’alimente en marchant. Sur la longue route qui mène au village des glaciers, un jeune coureur me rattrape en marchant … beaucoup plus vite. Je m’accroche à lui. On relance en courant de concert. Duc coup ce passage ennuyeux passe très vite. Le fameux coup du Pac Man cher à Yoyo fonctionne à merveille. Dés le début de la montée au Col de la Seigne, mon camarade me lâche. Doucement, mais surement. Une dizaine de coureurs me passeront. Tant pis, je monte à mon rythme. Je regarde la longue vallée derrière moi : la guirlande n’est toujours pas très fournie. Un peu frais en haut du col, mais rien de terrible. En revanche ma montre s’est remise à zéro, et je ne sais même plus quelle heure il est. Tant pis je m’en passerais, et à Courmayeur je vais récupérer mon GPS.
Col de la Seigne – Refuge Elizabetta – 4h19 – 9h45 – 63km – 3793D+ - 167°
La descente se passe bien, mais la fatigue de la nuit arrive doucement. Au refuge, je retrouve mon père qui aura fait le voyage. Je suis fatigué. Je rempli mécaniquement mon Camelback d’eau, et je repars en oubliant de prendre un bol de soupe. Plus très concentré le Steph. Je repars en marchant avec Géo. Il m’annonce que je suis maintenant sur la base des 29h. Pas mal finalement de courir sans montre.
Refuge Elizabetta – Col Chécruit – 6h17 – 11h43 – 72km – 4283D+ - 199°
Après le Lac Combal, j’attaque la montée à l’arrête Mont Favre. Il est 4h du matin passé, et j’ai toujours ce grand coup de barre lié à cet horaire. Une sorte de fatigue physiologique, qui ne s’estompe qu’avec l’arrivée du jour. Mon expérience du phénomène me permet de me concentrer sur ma progression, en recherchant la régularité. En attendant l’aube, qui finit par arriver sur l’arrête. C’est toujours un spectacle magnifique. Avec le massif du Mt Blanc qui passe du gris/noir à la couleur.
Col Chécruit – Courmayeur – 6h53 -12h19 – 77km – 4283D+ - 191°
La descente sur Courmayeur se passe très bien. La forme revenue avec le jour me permet d’effectuer une descente efficace. En arrivant sur le centre sportif Dolonne de Courmayeur, je me remets en mémoire ce que je dois faire dans la base vie. J’ai prévu 30 minutes pour prendre une soupe chaude, changer mes protections d’orteils si nécessaire, changer de chaussettes, mettre un t-shirt sans manche propre, mettre un élasto sur le 3° orteil qui tombe, récupérer la montre GPS pour quand même avoir une idée de ma progression. Finalement 21 minutes seront nécessaires. Parfait. Toujours en avance sur mon plan de marche des 30h.
Courmayeur - Bertone – 8h32 – 13h58 – 82km – 5097D+ - 158°
La traverse de Courmayeur s’effectue sans peine, contrairement à l’année dernière. En compagnie de … zut oublié ( !) – et qui m’annonce que Val est comme une balle, Yoyo 30mn devant. Départ de la montée vers Bertone au travers d’un sentier en sous bois très agréable avec un bon pourcentage mais régulier. Un groupe de deux coureurs me dépasse. Je m’accroche puisque je me sens finalement bien à leur allure. Nous rattraperons une dizaine de coureurs. A l’agonie en 2006 – déshydratation et coup de chaleur – je suis facile cette année. Super ! Je ne reste qu’une minute au ravito le temps de prendre un coca assis.
Bertone – Bonatti – 9h54 – 15h20 – 90km – 5482D+ - 170°
Après une courte montée, c’est un chemin en balcon facile, propice aux relances. Pas toujours simple, mais j’en ai encore sous le pied, alors pourquoi se priver ? Bon ok régulièrement des coureurs me rattrapent, mais je suis sur mon rythme, et la course est encore si longue à ce stade. J’ai mis ma montre GPS en route, son autonomie est de 20h, je devrais donc l’avoir avec moi jusqu’au bout. En regardant l’heure je pense être très en avance sur les 30h. En fait le chemin jusqu’à Bonatti est plus long que je ne l’avais enregistré dans mes souvenirs (pas vieux pourtant). L’arrivée sur Bonatti se fait par une montée très raide sur 200D+ max. Première sensation de moins bien. Je monte assez péniblement. Une fois arrivée au ravitaillement, je rencontre Christina, une bénévole qui était assise à côté de moi jeudi au contrôle des sacs à la remise des dossards aux coureurs. Très sympa elle s’enquiert de mon état : ai-je l’air si fatigué ? Je m’assois, très gentiment elle m’amène une soupe et un verre de coca. Un autre bénévole me remplit ma poche à eau. Quelle assistance ! Je repars au bout de 10mn avec encore 15mn d’avance sur les 30h. Tout va bien puisque le chemin ne fait que descendre jusqu’à Arnuva.
Bonatti – Arnuva – 10h55 – 16h21 – 94km - 5578D+ - 186°
Pourtant cette descente ne se passe pas si bien que ca. C’est mou, les appuis ne sont pas surs. 50 minutes pour 4 km, 100D+ et 400D-, ce n’est pas terrible. A Arnuva, je tente de faire le plein : soupe, coca, fromage, … tout y passe. Au bout de 5 minutes je ne vois plus très bien ce que je peux avaler en sus, alors je repars. Un bénévole me suit et engage la conversation en se présentant. C’est François des Bauges, que je ne connaissais qu’au travers du forum UFO. Il me reconnait grâce aux photos de mes CR sur le blog. Rigolo. Il m’accompagne jusqu’au début du raidillon qui annonce le Col Ferret. Je ne dois pas être très causant. Désolé François, mais encore merci, ca fait toujours du bien d’échanger quelques phrases.
Arnuva – Col Ferret – 12h50 – 18h16 – 98km – 6346D+ - 239°
Bing, raide dans la pente, en appui sur les bâtons, je n’avance plus. Je suis sec. Le pourcentage est très important, et il commence à faire très chaud. La totale. Je n’ai plus qu’une idée en tête : il faut avancer coute que coute. Peu importe le chrono. Avancer jusqu’à ce que ça aille mieux. Les basiques remis à l’œuvre : un pas devant l’autre. Bien sur ca double sans arrêt, et ca en devient presque pénible de devoir se mettre su le bas côté toutes les 30 secondes. De petits pas en petits pas je finis par arriver au refuge Elena, au pied de l’ascension du Col Ferret. Il me semble impossible de le gravir là maintenant. Décision est prise me reposer. Je m’allonge sur l’herbe et dors 15mn. Je repars. D’un pas lent et lourd. Dans la montée vont me doubler CastorJunior et Jérôme Lesseur (JJ). C’est très lent, mais ca avance. L’air frais de l’arrivée au sommet me redonne un peu de jus, mais pas suffisamment pour me donner un air rassurant : une bénévole s’avance vers moi en trottinant, se présente comme infirmière, et me demande si tout va bien. Intense solitude … Ai-je l’air si décomposé ? Je tente de la rassurer en lui disant que je suis juste vide d’énergie, mais qu’à part ça, touti va bene. Ouf elle me laisse repartir. Je ne m’arrête pas au sommet et attaque la descente.
Col Ferret – La Fouly – 14h24 – 19h50 – 107km – 6357D+ - 250°
Jérôme est arrêté sur le bas côté pour se restaurer. Je la laisse, il me rattrapera plus tard. La descente me permet de me relancer et de récupérer. En petites foulées entrecoupées de courtes marches. Au refuge de La Peulaz je m’occtroye une belle pause de 10 minutes avec remplissage de la poche et gavage de la bête en coca et soupe. Un peu de pain d’épice maison et pate d’amande. La descente bien raide se passe bien, et arrivé sur le parking il faut relancer sur la route. Encore quelques kilomètres pour rejoindre La Fouly. Stef me rejoint, on reste ensemble 5 bonnes minutes, mais à la relance je le sens plus vif. Je lui demande d’y aller. A 500m du ravitaillement l’Ultra Staff est de retour, de bonne humeur et reposé – à l’exception de Géo qui a voyagé toute la nuit du côté de Courmayeur et d’Elizabetta. Il m’annonce mon camarade Damien Lebas à 1h derrière à Courmayeur avec des ennuis de poche à eau dés Saint Gervais. Pourvu que ca passe pour lui. A La Fouly je ne calcule pas Sanglier (Emmanuel Lamarle) – qui m’en voudra surement très longtemps – et retrouve Stef. Là encore longue pause de 10 minutes pour reprendre des forces. Toujours un peu vide, mais le physique suit. Pas de casse ni bobos.
La Fouly – Champex – 17h15 – 22h41 – 122km – 6890D+ - 254°
L’Ultra Staff est visiblement heureux de me voir repartir – comme pour l’infirmière de Ferret ca ne leur semble pas évident à eux non plus – et le couple Sabine / David courent avec moi sur cette longue partie plate jusqu’à Praz de Fort. Sur le chemin on rattrape CastorJunior qui marche en téléphonant. Je ne le dérange pas et le double. J’aurai du remord plus tard en apprenant qu’il abandonnera à Praz de Fort (souvenirs de mon abandon 2006) et qu’il se fera agresser par Oliv91 pour lui dérober un bâton (casse du sien dans la descente vers Les Chapieux). En passant près du banc sur lequel j’avais abandonné à la sortie de la moraine, j’ai une pensée : cette fois ci je vais plus loin, c’est sur ! A l’attaque de la montée vers Champex à Issert, Sabine et David échangent leur place avec Géo. Il me servira de lièvre toute la montée. Je m’accroche à son short tel un morbak, mais c’est dur, lent, lourd. 400D+/h/ A l’approche de Champex, je ne me sens pas bien du tout, très faible. Ca se confirme une fois à la base vie. Impossible d’avaler quoi que ce soit. Assis à la table, je croise Alice (la femme d’Oliv91) qui me regarde un peu halluciné par mon état. Je dois être très blanc. Elle hésite entre me « porter secours » et aller accueillir Olivier qui doit arriver rapidement. Elle part, et je ne la sens pas tranquille. Je m’effondre la tête sous les bras pour cacher mon désespoir. Je cherche une solution, et me rappelant qu’il faut bien souvent juste attendre sans paniquer, je décide d’aller m’allonger et éventuellement voir un médecin. Mon Ultra-Staff me laisse gérer ne sachant surement pas très bien quoi dire ou faire. Un médecin vient, me serre la main (1er test), me regarde, me parle, prend le poult et la tension. Rien, je vais très bien. Je dors 20mn, puis je me relève et vais me faire masser. Je suis plus à ça prêt. Une podologue soigne mon ongle en même temps. Le grand luxe. Changement de chaussettes, crème anti-frottements, et t-shirt manche longue. Ensuite je retourne manger, et miracle j’avale tout. 1h25 plus tard je peux repartir, au grand soulagement de l’Ultra Staff.
Champex – Bovine – 20h44 – 26h10 – 131km – 7594D+ - 278°
Même si l’objectif 30h est cette fois ci bel et bien mort et enterré, plus que jamais celui de terminer est d’actualité. Au bord du lac, accompagné de l’Ultra-Staff, je croise Françoise et Antranik. Tient que font-ils là ? Ne courent ils pas ? En fait je n’arrive pas vraiment à faire le lien. Je n’apprendrais que plus tard qu’Antranik a du abandonner. En discutant le chemin avance assez vite en alternant course et marche jusqu’au début e la terrible montée de Bovine. Reconnue le dimanche d’avant avec Manu (Sanglier) et Oliv91, je la sens bien. Accompagné de mon père, il va devoir décrocher, tellement je suis fort. Du 1000D+/h ! Quel contraste avec mon arrivée sur Champex ! Je rattrape une dizaine de coureurs, les grandes pierres sont enjambées avec plaisir. Je m’amuse. Sur le magnifique balcon qui surplombe la vallée du Rhône, je rejoins Greg et son frère Tom, venu de l’autre côté par le Col de la Forclaz, pour m’accompagner un bout de chemin. Ca me fait drôlement plaisir, d’autant qu’ils viennent de Grenoble exprès. Je ne passe que 1 minute au ravito de Bovine.
Bovine – Trient – 22h04 - 27h30 – 137KM – 7668D+ – 266°
La nuit tombe. Nous redescendons sur le Col de Forclaz. Descente rapide, facile, et joyeuse. On s’amuse bien à jongler avec les appuis. Nous rattrapons à nouveau 6 coureurs. Je suis étonné de ne pas rejoindre Oliv91 avec ma vitesse depuis Champex. Alice me l’a annoncé 15 minutes devant. Il doit lui aussi être pas mal. Tant mieux ! A Trient, l’Ultra Staff est au complet. Je rentre dans la tente du ravito par le mauvais côté. Je ressors et coupe. Plus tard en remontant sur les Tseppes, je serais inquiet de ne pas avoir fait fonctionner la puce permettant de valider le passage. En fait si. Sous la tente l’ambiance est merveilleuse et festive. Il y a même de la raclette pour les accompagnants ! Le speaker annonce le temps et classement, ainsi que l’origine des coureurs. Trop forts les Suisses. Mais je commence à nouveau à entrer dans ma bulle. L’état de grâce n’aura duré « que » 3h1/2. Je prends le temps d’avaler une soupe, un coca, et de remplir la poche. La montée vers les Tseppes promet d’être difficile.
Trient – Vallorcine – 1h13 – 30h39 – 146km – 8456D+ - 270°
Promesse tenue : c’est très difficile. A nouveau, et en sens inverse, quel contraste avec l’état de légèreté des Bovines. A nouveau lourd, lent, je me concentre sur mettre un pied devant l’autre. Je la connais bien cette montée. Et pourtant j’ai vraiment l’impression que c’est beaucoup plus long. J’attends la sortie de la forêt avec impatience, signe d’arrivée au col. Greg et Tom sont toujours là, et quand Greg me pose une question, je ne réponds plus. Dans ma bulle. Désolé Greg ! On sort enfin de la forêt, et pourtant je ne vois toujours pas la fin. A chaque virage je crois me rappeler que c’est la fin de la montée, et puis non. On aura là aussi fait du 400D+/h. Et puis arrive le balcon, la délivrance. Il n’y aura plus de vrai montée jusqu’à l’arrivée. Et pourtant c’est loin d’être fini pour autant. Les 20 derniers kilomètres devront être gagnés mètre après mètre. Nous faisons la descente vers Vallorcine se fait prudemment. Je n’ose prendre le risque d’une entorse, les chemins sont très étroits, dans la pente, avec beaucoup d’eau. On glisse, on dérape. Les bâtons aident bien. A Catogne – en plein milieu de la pampa – deux bénévoles sont sous une tente et assurent un contrôle volant. Courageux car complètement isolés, il fait frais, et les coureurs à ce stade ne doivent pas tenir grande conversation. Un peu plus loin nous croisons deux autres bénévoles qui vont prendre la relève. Belle marche de nuit pour eux. Après le sentier, nous rejoignons le télé siège qui monte les skieurs au Col des Posettes, nous indiquant que dorénavant nous aller attaquer un large chemin carrossé avec des pierres qui font mal aux pieds surchauffés. Ca ne durera que quelques virages, le balisage nous orientant à nouveau sur un sentier qui coupe la route forestière rendant la descente plus ludique et moins ennuyeuse. Le ravito de Vallorcine semble un peu triste. L’Ultra Staff confirmera cette impression. Bienvenue en France ! Court ravitaillement.
Vallorcine – Argentière – 2h38 – 32h04 – 153km – 8662D+ - 272°
En sortant de la tente, accompagné de David, Tom, et Greg, le froid de la rivière juste à côté nous saisit. Je remonte les jambières, et ferme la veste Gore Tex. Nous alternons course et marche au grés de mes envies. Le groupe suit gentiment à l’imitation. Nous reprenons des coureurs, d’autres nous rejoignent. Le Col des Montets est rapidement atteint. Une fille nous passe. Je me décide à la suivre. Son rythme régulier me va bien. Nous tenons un rythme de course toute la descente jusqu’à Argentière. Au ravito, un bénévole me soutient mordicus que c’est tout en descente. Je connais bien le parcours – c’set mon terrain de jeux lors de mes footing – et je sais qu’il y a trois petites montées de 100m chacune environ. Et vu mon état, va falloir encore serrer les dents. Sabine se joint au groupe pour terminer tous ensemble.
Argentière – Chamonix – 4h42 – 34h08 – 163km – 8835D+ – 289°
Et le petit train repart. Plus de jambe, mais plus de raison de se plaindre non plus, on va y arriver. Mais le seul moment où je vais me sentir vraiment et définitivement arrivé sera au Bois du Bouchet, soit à 1 ou 2 km seulement de l’arrivée. Sur la piste de ski de fond –surréaliste à 4h du matin – un monsieur, seul sur sa chaise de camping applaudi chaque coureur. Merci Monsieur. Sur Chamonix je demande à l’Ultra Staff de me laisser seul dans ma bulle pour me permettre de savourer pleinement l’entrée dans la ville, la délivrance, et peut être déjà une certaine nostalgie. Seul dans une ville déserte. Et puis les 20 derniers mètres, avec quelques spectateurs qui attendent probablement leur coureur, leur champion du jour. Seul et Catherine Poletti qui m’accueille sur la ligne d’arrivée. Je l’embrasse – je n’avais même pas réalisé que mon odeur fétide pouvait l’incommoder – et trouve des mots émouvants et me dit merci pour être allé au bout de cette aventure. Je lui réponds que c’est qui la remercie pour m’avoir permis de la vivre.
Je prends ma polaire estampillée Finisher, et je ne suis pas prêt de la jeter celle là, rires !
Et puis je vais remercier mon Ultra-Staff pour avoir respecté mes allures, ma bulle. Je fais remarquer que le ravitaillement de l’arrivée est strictement le même que tous les autres, et je ne veux plus entendre parler de soupes et de coca ! Au bout de 10 minutes je me gèle, on rentre. Une réflexion au passage me fait dire que c’est vraiment dur comme course, et qu’on ne m’y reprendra peut-être pas. Enfin une douche et au lit. On verra bien plus tard. En attendant mission accomplie.
Epilogue
Le lendemain matin, en me levant je remarque que Philippe Billard et Stéphane Marchand (RunSteph) sont annoncés sur le site web de la course à Argentière et pas encore arrivés. Je me précipite dehors pour les accueillir. Trop tard, ils sont déjà assis, un peu comme deux frères zombis. Je devine qu’ils sont encore dans leur bulle, heureux et vidés. Yoyo sera arrivé avec Eric en 28h, et Val a tout explosé en 27h. Bravo les gars.
Je suis également heureux de voir que Damien sera 1h30 derrière moi, il a donc bien maintenu l’allure sur la deuxième partie, et bien digéré ses problèmes sur la première. Et surtout nous sommes désormais Finishers, nous qui avions abandonné presque au même endroit en 2006 (Praz de Fort et La Fouly). Oliv, Sanglier, et Stef dans les 32h. ; Seul manque à l’appel Castor et bien sur Antranik. La prochaine fois.
La météo aura été superbe tout le long, et c’est surement une première pour cette petite course autour de la grande montagne. Les 10 jours suivants, je n’aurai aucune courbature aucune blessure, pas une seule ampoule (recette jus de citron et crème anti frottement - la semaine d’avant course - juste géniale !). Juste une bonne fatigue, et un léger état dépressif normal après une telle dose d’endorphine, et surtout le vide laissé par l’objectif accompli. Seul symptôme, partagé par pas mal de coureurs, un œdème à la cheville droite et des fourmis aux orteils. Un mois après ils sont toujours ankylosés.
Un grand merci aux organisateurs et aux bénévoles (tient je me remercie aussi au passage !). A l’Ultra Staff exemplaire. Aux coureurs et randonneurs croisés pour leurs sourires et soutient dans les moments difficiles. Marrant aussi de voir des coureurs nous reconnaître avec mon père grâce aux photos des CR de courses et des Off !
Petit bémol sur le commentaire justifié de Scott Jurek sur le comportement de certains leaders de la course, confirmés sur certains points par mon père spectateur de certaine scène. A vous de voir.
Deuxième bémol, perso cette fois : je constate que je fais toujours l’objectif de l’année d’avant. Trop ambitieux ou jamais satisfait ? De plus je n’arrive toujours pas à être régulier dans ma progression, que se soit sur une course ou même en Off (Oliv91 et Patrak m’en avait fait la remarque. Et là je ne sais pas vraiment par quel bout prendre le problème. Peut-être m’attacher les conseils d’un coach professionnel, genre Yoyo (si il n’a pas encore été acheté par le Bayern de Munich ou Chelsey !).
Dans tous les cas, venez y ou revenez y ! L’année prochaine, peut-être une corse de 220km et 17.000D+ par équipe de 3 faisant tous les cols plus ceux des Aiguilles Rouges ? A moins que faire l’objectif 2007 de moins de 30h … A suivre …
Reportage France2
Compte Rendu Scott Jurek
Reportage Libération