Officiellement 81km pour 1500D+, à mon GPS 77km pour 1450D+
32° sur 735 arrivants et 900 inscrits
Photos et images GPS : Christian Bouteille - Bottle
Préambule
Toute la communauté du trail IdF s’en faisait une joie depuis qu’Hervé Pardailhe et ses acolytes nous avait annoncé leur intention d’organiser le premier ultra-trail Parisien. Déjà, le site web, très léché et tendance, annonçait la couleur : très pro !
En annonçant un parcours de 81km sur les terrains d’entrainement de la plupart des coureurs Parisiens, et avec une arrivée sur le premier étage de la Tour Eiffel, les 900 places de la course sont vite parties dés sa première édition, et au vu de la prestation fournie, je suis certain que cette course va très vite devenir une classique avec plusieurs milliers d’inscrits.
Me concernant, je décide spontanément d’y participer pour les raisons ci-dessus, et en plus ca permet de caser une course ultra au milieu du ski de fond et de rando à une période où il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la semelle. L’entrainement du moment est orienté sur de la VMA en vue de battre mon record perso et d’approcher le plus possible des 3h au Marathon de Paris. Pas vraiment un entrainement pour le long, mais finalement …
Le départ
Incroyable, mais rien que d’arriver au départ d’un trail urbain c’est déjà une épreuve. L’organisation n’est pas en cause, bien au contraire, c’est super pro et super écolo : tout le monde passe par le palais des sports Robert Charpentier d’Issy les Moulineaux pour prendre son dossard, et l’organisation remet un ticket de RER pour rejoindre St Quentin en Yvelines. On croise Vincent Delebarre qui a bien failli prendre un RER le renvoyant dans une lointaine banlieue : un remake de « Saving Private Delebarre »(1) ! Au débarquement la joyeuse troupe à l’instinct grégaire fait un large détour avant de trouver les bus qui nous amènent à la base de loisir. D’habitude le départ est proche de la tente, cette fois ci il m’aura fallu deux métros, un RER, et un bus. Urbain je vous dis.
Départ – 21°km – 91° - 1h48 : Bruyas me catapulte
Nous prenons le départ avec Vincent Baudrat, sportif accompli, un brin anxieux pour son premier ultra trail, qui sera un succès ! Nous partons doucement les deux premiers kilo, car je suis encore transi de froid. Peu à peu je me réchauffe, et on attaque les 12/13km/h de moyenne sur un parcours largement plat jusqu’au premier ravito. Le peloton s’étire très vite, et il n’y aura jamais de bouchons. Etonnant pour un groupe de 900 coureurs au départ. Très rapidement nous formons un petit groupe de coureurs homogènes avec Vincent, Didier Bruyas, et d’autres encore. Avec Didier nous avons fait connaissance au gymnase, c’est un UFO, et un très bon coureur. Il impose un rythme soutenu que je n’aurais probablement pas pris dés le début sans lui. Dans les montées c’est à mon tour d’imposer le rythme, avec une technique trail rodée, que semble ne pas avoir la plupart des coureurs. Ce sera confirmé par la suite, la plupart des coureurs sont des routiers et non des trailers, ce qui rend ce trail vraiment atypique et intéressant. Vincent suit à quelques mètres, mais semble un peu limite. Je sens qu’avec Didier on va faire « quelque chose ». Tant pis, même si je suis venu ici sans objectif précis, je m’engage et vais me mettre volontairement dans le rouge.
21°km – 50°km – 39° - 4h20 – Pac Man avec Super Bruyas
Au ravito, fidèle à ma stratégie “ne jamais s’arrêter, toujours avancer”, je rempli mes poches d’aliments et ma gourde d’un mélange coca/eau (les 1l et demi de la poche à eau tiendront jusqu’à la fin) en 30s, et je repars doucement en marchant et en mangeant. Vincent et Didier me rattraperont. Didier, oui. Au bout de 5mn. Les premières montées s’enchainent, sans jamais durer très longtemps. Nous courons ou marchons vite. Avec des relances toujours rapides. Notre duo avec Didier est maintenant rodé : il fait le rythme sur le plat, je le passe en montée, et il relance plus fort. Je suis tout de même surpris. A chaque montée nous passons des grappes entières de coureurs, et aucun d’entre eux ne relance 5 mètres avant la fin de la montée. Ils sont littéralement scotchés à la pente. Le jeu de Pac Man va durer jusqu’au deuxième ravito. Au 43°km, un contrôle surprise. Avec Didier nous nous faisons la réflexion que la course commence vraiment ici. Et effectivement des contractures importantes se forment au niveau de mes quadriceps supérieurs. C’est là qu’on sait si on a le mental pour passer outre, dire au cerveau qu’on fera avec, et garder le même rythme. Didier commence systématiquement à me prendre quelques mètres sur les plats. Je me force à garder le contact au moins visuel. A chaque montée, je reviens sur lui. Je commence à sentir les prémices d’une hypoglycémie. Je pense régulièrement à Damien que j’ai croisé un peu plus tôt sur le parcours, qui aurait du faire la course, qui a quelques ennuis de santé. Comme il me l’a dit au téléphone ce matin « tu coureras pour nous deux ». Oui Damien, et ca me donne ton courage également.
Ouf, le ravito arrive !
50°km – 63°km – 34° - 5h46 – le deuxième étage de la fusée s’allume
Même stratégie au ravitaillement. Mais cette fois ci, comme nous sommes très peu de coureurs (trois ou quatre), les bénévoles s’occupent de tout. Je n’ai rien à faire. Génial ! Nous sommes avec la troisième féminine du moment, qui se fait interviewer. Elle a mal aux jambes aussi. Tu m’étonnes ! Je repars en marchant laissant à nouveau Didier faire un ravito où il a prévu lui de passer un peu de temps. La féminine et le groupe de 3 ou 4 coureurs que nous avions passé dans la dernière montée – une habitude maintenant – me repassent à forte allure. Je repars en courant, et dés la première difficulté je la rejoins et la passe sans difficulté. Au bout de 10mn environ Didier est revenu sur moi. Bonne nouvelle, car tout seul, je ne suis pas aussi volontaire dans les reprises. Et puis, étonnamment je ressens moins mes douleurs, je fais avec, et sens une deuxième forme arriver. Alors je sens que je peux tenir ce rythme imposant pour moi de 12/13km/h dans tous les replats, courir ou marcher vite les côtes. Et là Didier commence à lâcher dans une côte. Et puis ne reviens plus sur moi comme d’habitude sur les relances. Il finira juste 15mn derrière moi à l’arrivée avec une superbe 3° place en V2. J’hésite un peu à attendre, et puis non. J’ai déjà abandonné Vincent, donc mon statut de traitre est déjà entériné, et puis si c’est grâce à Didier que j’en suis là, je lui dois au moins de faire de mon mieux pour performer maintenant. Ce résultat sera aussi le sien. Alors j’insiste encore plus fort. Et je me sens très fort. Tellement que je finis par rejoindre le groupe de coureurs qui m’a lâché après le deuxième ravito. Et pareil au même, première montée, je les passe, relance, je les largue. Je passerai un peu de temps avec une autre féminine, jeune femme qui court des cross, et qui a une foulée surprenant sur le plat, mais qui cale littéralement au moindre dénivelé. Elle aussi m’aide à garder un rythme soutenu sur le plat. D’ailleurs je ne regarde pas vraiment les paysages. Cette forêt de Meudon, je la connais par cœur, de Meudon jusqu’à Versailles, et ne m’enthousiasme guère. C’est vraiment la montagne mon truc. Alors je me concentre sur le rythme de course. Nous arrivons au ravito du Haras de Jardy.
63°km – 70°km – 33° - 6h27 – Etat de grâce
20s au ravitaillement, façon Formule 1 avec des bénévoles aux petits soins. Le froid tombe avec la nuit. Je mets la frontale, et commence à pleurer mes gants oubliés à la maison. Et là c’est la procidence qui ne me quitte plus : par terre, de magnifiques petits gants roses en polaire n’attendent que moi, surement négligemment perdues par une jeune fille. Merci et big bisous ! Ni une ni deux, je prends. Et c’est reparti ! La nuit tombe, et dans la forêt il faut faire plus attention aux pierres et autres pièges sous les feuilles qui tapissent le sol. Mais je connais. Et j’adore courir de nuit. Une ambiance de bout du monde au pied de Paris. Je suis seul et vais le rester un long moment. Dans la longue descente dans parc de St Cloud, je vois un photographe. C’est Emmanuel Lamarle – Sanglier – qui encourage les UFO. Sa première phrase me tue : « ben qu’est ce que tu fais là ? ». Que dois-je comprendre : visiblement ce n’est pas le lieu géographique qui lui semble inadapté puisque lui-même est là ainsi que les rubalises. Non c’est bien ma place et mon temps qui l’interloquent et le rendent dubitatifs. Sa deuxième phrase m’achève : « tu as coupé ? ». Ben … heuuuu… non … je réfléchis … bien toujours été à suivre des rubalises … jamais perdu en train de jardiner … « non Manu, juste que je suis en forme c’est tout ». Il court avec moi jusqu’au ravito. M’encourage.
70°km – arrivée – 32° - 7h33 – Et la Tour Eiffel scintilla !
20s au ravito le temps de remplir la gourde. Les poches sont encore pleines de celui d’avant. Descente sur la fin du parc de St Cloud. Je vois une lampe de coureur devant moi. Ca faisait longtemps. Je le prends pour cible. C’est sur le Pont de St Cloud que je le rejoins. Il Jardine pour trouver le chemin. Grâce à lui, je ne jardine pas. Il m’évite de continuer tout droit et de rentrer sur Boulogne. Nous sommes ensemble maintenant, mais il a une sacré foulée, et moi je commence un peu à faiblir. Nous longeons les quais de Seine, et dans Boulogne cette fois nous jardinons quelques minutes à deux. Avec les lumières de la ville, on ne voit plus les rubalises. Il fallait traverser la double voie pour arriver dans un parc. On repart, mais lui beaucoup plus vite. Je ne cherche plus à suivre. Et là ca dure longtemps. Nous restons à longer la Seine pendant cinq longs kilomètres. Sandrine sur un quai rompra la monotonie de cette arrivée en tentant de prendre une photo de face, mais comme avec la plupart des photographes amis le long de ce parcours (Damien, Romuald, …) elle n’y arrive pas. Et puis grosse surprise, à 500m de l’arrivée, je vois, ou plutôt j’entends quelqu’un avec une foulée de marathonien à 16km/h derrière moi. Je me retourne, c’est Brigitte Bec, deuxième féminine. Elle est pourtant devant moi depuis le début (6 à 7mn confirmé par la feuille de résultats) et je ne l’ai jamais doublé. Soit je ne l’ai pas vu au ravito, soit elle a jardiné. D’ailleurs on re-jardine ensemble à 100m de la Tour, en loupant le dernier quai. Au milieu des touristes, tels des extra-terrestres avec nos drôle de tenues, nous nous frayons un passage jusqu’à la Tour. Nous avons perdu quelques minutes, mais là c’est le bonheur : cette superbe arrivée sur la Tour Eiffel illuminée, instant magique ! Au pied de la Tour, on nous donne un ticket d’entrée, et nous avons droit à une fouille légère du sac (surréaliste dans une course de trail, mais normal avec Vigipirate). Enfin nous pouvons gravir le premier étage de la tour où s’adjuge l’arrivée. Je cours, comme j’aime le faire, en gravissant les marches deux par deux. Brigitte elle marche, et ne peux pas courir. Décidément drôle de course. Des photographes sont sur les marches, l’arrivée est triomphale. Il est 20h pile poile, la Tour se met à scintiller : la providence et l’état de grâce jusqu’au bout. Encore mille merci Monsieur Didier Bruyas !
Epilogue
Sur la Tour, il fait froid. Je tourne en rond pour trouver l’ascenseur. Mes quadriceps supérieurs me font très mal, et en refroidissant m’empêche de lever la jambe. En revenant sur mes pas, je vois Val qui arrive. Nous redescendons ensemble, allons à la douche à environ 0,7km/h car je me traine. Le massage fait du bien. Nous retournons manger à la tente, qui permet également de voir les potos arriver sur l’estrade.
Je me traine jusqu’au métro station Bir Hakeim, avec les chicots qui claquent tellement j’ai froid. Et là horreur et damnation, la station en travaux est fermée ! Il faut marcher jusqu’à Dupleix. Le trail urbain continue …
Bilan
Une course de rêve, avec aucun moment où je sens que j’aurais pu faire mieux.
L’organisation est super pro. De bout en bout. Pas simple d’organiser ce type d’évènement jusqu’au cœur de Paris. La montée des marches de la Tour Eiffel est juste magique. Et pourtant, le parcours ne m’inspire pas assez pour dire d’y retourner. J’aime vraiment trop la montagne. Alors l’année prochaine, je serais bénévole dans l’organisation. Car c’est génial de voir autant de coureurs de route s’aventurer sur un trail … même urbain !
(1) Il faut sauver le soldat Ryan - 1998 by DreamWorks with Tom Hanks and directed by Steven
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